Qui a cru que ça allait être simple !?
Levés 7h30 nous partons à la recherche, (en scooter que nous avons encore jusqu’à 11h) d’un moyen de se rendre à Houei Sai au Laos.
Lorsque nous trouvons les Songthaew, l’un d’entre eux est sur les startings-blocs. Il part dans notre direction, mais nous n’aurons jamais le temps de rendre le deux-roues, faire nos valises et revenir avant qu’il parte. En discutant avec son voisin, il nous propose de nous y emmener dans 1h, après avoir passé un coup de fil, pour confirmer à priori que nous ne serons pas les seuls à faire le trajet. On accepte, et on se réparti les tâches assez efficacement ; j’irai poser le scooter pendant que Pauline rassemble les affaires dans la chambre. Nous sommes, assez étonnamment, prêt à embarquer une heure après !
Le trajet sera assez étonnant, nous ferons des énormes détours pour déposer nos deux covoitureurs. L’une d’entre elle sera déposée au bout d’un minuscule chemin de terre au bord de l’eau avec ses dix sac remplis de marchandises. Elle va surement continuer en bateau.
Ici encore le trajet se fera en deux parties. Le premier chauffeur nous prendra en effet que la moitié du prix annoncé et le deuxième bien la partie restante. Ça semble étonnement bien ficelé. Nous ne serons plus que deux sur le prochain tronçon, le trajet sera donc plus direct et plus rapide. L’arrivée à la ville frontalière, Chiang Khong, aura pris moins de temps que prévu. Il n’est pas encore midi !
Le passage de la frontière
Alors ce qui est sympa, c’est qu’en arrivant, nous voyons à quelques mètres de notre point de dépose un panneau indiquant « immigration bureau » et « cross-point ». Hop, sacs a dos remis en place, et nous sommes en route. Ça va être plus rapide que prévu ! Quelques mètres avant d’arriver au lieu visé, une foule de Tuk-Tuk nous accostent pour nous amener à la frontière.
Lorsqu’on leur explique qu’on souhaite traverser ici, ils nous disent que ce n’est pas possible et nous proposent leurs services pour nous amener au « pont de l’amitié », point de passage pour les étrangers nécessitant un visa. On les croit à demi-mot, mais tant qu’à être à côté d’un poste frontière, on décide de demander aux officiels avant. En effet le pont ici n’est que pour les locaux … Il va bien falloir faire 10km en TukTuk vers le pont, passer la frontière, et faire à nouveau 10km dans le sens opposé … C’est quand même bien foutu. Donc voilà après deux Tuk-Tuk, 62$ de visas et un bus on se retrouve enfin au Laos !
Houei Sai, ville dortoire
Premier pied au Laos : Houei Sai. Ville frontalière. Couloir de restaurants et d’auberges pour les étrangers en transit. Houe Sai. Premier contact avec la population : « Si tu ne viens ni manger ni dormir chez moi, je t’ignore. » Voilà le sous texte criant. En plus de cette atmosphère de business, la route principale est arpentée de long en large par les étrangers. En l’espace de 10 minutes nous croiserons plus de français que nous n’en avons croisé durant notre premier mois de voyage. On est ramené illico à notre statut de touristes consommateurs, déjà très loin de l’accueillant et authentique Nord de la Thaïlande.
On dit souvent que la première impression est la bonne, voilà la nôtre à ce moment là « Il va être difficile de rencontrer la vie Laotienne ». Nous n’avions pas vraiment tort… On fait alors comme tout le monde, on tue le temps dans cette ville étape incontournable avant d’accéder à Luang Prabang, le joyau du Laos paraît-il. En ce moment, on marche sous le cagnard, à la recherche d’un lieu où passer la nuit. J’ai téléchargé une application pour apprendre le minimum de mots qui permet d’avoir un premier contact humain agréable avec les habitants de notre nouveau pays d’accueil. « Sabaidee ! Kop Chai, Lacon et kaluna » « Bonjour ! Merci, Au-revoir et s’il vous plaît » (Malgré mes multiples tentatives, pas un seul Laotien n’aura compris mon « Kaluna » :).
On utilisera des KIP pour monnaie. 1€=10.000KIP. Attention les gros chiffres! 1ère fois qu’on aura retiré plus d’un million au distributeur ! On a choisi notre guesthouse qui sont toutes au même prix. 80.000 kip (8€) la nuit. Le prix de l’hébergement est donc 2 fois moins cher qu’en Thaïlande, c’est la nourriture qui va rattraper la différence.
Le Laos importe tout !
Plus tard un « vieux pirate » (j’entends par là « un baroudeur aguerrit qui connaît le pays comme sa poche»), en l’occurence, un Français d’une bonne cinquantaine installé au Laos depuis 13 ans et qui, après avoir vécu dans tous les autres pays d’Asie du Sud-Est, nous expliquera que le Laos ne produit rien sur son territoire excepté du riz (et seulement une culture par an contrairement au Thaïlandais qui en font 3). L’agriculture qui occupe 60% de la population active n’est utilisée que dans le seul but de subvenir aux besoins de sa propre famille. Peu industrialisé, le Laos importe 2 fois plus qu’il n’exporte. Même la célèbre sauce soja que l’on retrouve dans tous les plats asiatiques est importée de Thaïlande. C’est donc pour ça que les plats coûtent aussi chers !
Selon un adage …
« Le Vietnamien plante le riz, le Cambodgien le regarde pousser, le Laotien l’écoute et le Chinois le vend … »
Pour les curieux qui aimeraient en savoir plus
https://www.geo.fr/voyage/communisme-economie-de-marche-le-laos-sort-du-secret-170545
Comme un air de France
Il est temps de découvrir la gastronomie de notre nouveau pays d’accueil. Les restos sans charme de cette rue commerciale présente tous la même carte photocopiée avec des plats de base comme du « fried rice chicken ». Il arrive que les propriétaires ne nous jettent même pas un regard à notre approche. On va donc pousser la recherche un peu plus loin … Ben me fait confiance, pour les restos c’est moi la guide 😉
Un escalier dérobé nous permet de prendre de la hauteur sur cette rue sans âme. Chaque marche nous éloigne un peu plus de ce décor superficiel et nous rapproche du calme. Au milieu de cette longue montée qui mène à un Temple, un chemin s’ouvre sur la gauche et là, très belle surprise ! Un beau chalet/cabane en bambou sur 2 étages avec un menu aux influences européennes et françaises … Soupe de potiron, spaghettis à la bolognaise, pain, biftek et french fries ! Je ne vous cache pas ma joie 😉
Ce ne sera que le début de la découverte d’un pays imprégné des traces encore fraîches de l’empire colonial français. Le voyage pour nous, en ce moment, c’est aussi découvrir qu’il y a des bouts de France un peu partout. La nuit tombée, on rejoint notre cité-dortoir. Hâte d’être au lendemain pour monter à bord de la barque qui nous bercera au fil du mythique Mékong.
On vous embarque en Slow Boat !
Le lendemain, le voyage en Indochine suit son cours. C’est bien un
« sandwich baguette » qui est proposé en guise de casse-croûte pour notre long voyage.
8h30. Le tuk-tuk débarque. Il ramasse les touristes des auberges. Nous sommes 8 à l’arrière serrés les uns contre les autres. Le trajet jusqu’au lieu d’embarcation est de 5km. Notre place a coûté à chacun 30 000 KIP, c’est-à-dire 3 euros. Donc 8X3 = 24 euros en 10 minutes de trajet alors que 75% des Laotiens vivent avec moins de 2 euros par jour dans le pays le plus pauvre d’Asie du Sud-Est. Ça nous donne très vite une idée du bouleversement provoqué par l’arrivée du tourisme il y a 15 ans.
Parmi nos 8 voisins de bancs, 2 couples extrêmement sympas venant de Suisse et de Belgique. La connexion est immédiate. Ils deviendront nos compagnons de traversée pendant les 2 prochains jours. A l’arrivée sur le bateau, on rencontre un Breton pieds nus bien cool qui va se joindre à notre clic. Vous allez vite les reconnaître …
La vie sur le Mekong « Mère de toutes les eaux »
La navigation à travers les forêts encore préservées du pays est une expédition hors du temps. Toucher du doigt la sérénité qui règne sur ce cours d’eau, source précieuse et vitale pour ses quelques millions d’habitants. Éclaboussés par les rayons du soleil, caressés par le vent, nous avons l’honneur de nous laisser porter par le mythique Mékong à la découverte d’une population qui vit encore de pêche et de cueillette.
Les pêcheurs
On n’en revient pas. Il y a encore des gens qui vivent comme ça ! Les rives recouvertes de forêt primaire cache des cahutes de bambous qui doivent abriter les quelques familles vivant sur les rives. Il n’y a rien à l’exception de quelques habitations de fortune ensevelit sous la nature sauvage. C’est elle la chef ici, aucune trace de l’homme moderne, du destructeur ou de l’industrialisation. Seuls des batons de bambous habillés de filets de pêche sont disposés adroitement entre les rochers. Ils surgissent dans ce décor vierge de tout superflu où l’Homme ne paraît répondre qu’à ses besoins primaires. Ici, « l’industrie du besoin » n’a pas de place pour exister.
Quelques habitants perchés sur les rochers. Des enfants sur les ventres des mamans. Tout au long du voyage, je vais répéter à Ben « Il n’y a pas une seule femme laotienne sans un enfant suspendu à son coup ! ».
Une Laotienne a en moyenne 4.5 enfants au cours de sa vie. La mortalité infantile est encore très élevée due à la difficulté d’accès aux soins.
Pour en savoir plus
Les chercheuses d’or
Nous apprendrons plus tard grâce au fameux guide du routard, que « les femmes qui habitent le long du Mékong creusent la terre du rivage, puis la lavent pour en extraire une fine poussière noire où scintillent quelques paillettes d’or. Cette poussière est ensuite mise au contact du mercure, qui dissout l’or. Puis le mercure est chauffé. En s’évaporant, il libère l’or, qui est vendu aux bijoutiers de la ville. »
Pendant ce temps sur notre barque
La zone apéro qui se créée automatiquement dans chaque lieu mobile ou immobile, sera implantée spontanément à l’arrière de la barque à côté du moteur qui, visiblement, ne gâche en rien le plaisir d’une bonne Beerlao fraîche.
Et pourtant …
J’opte pour mon siège sur l’eau avec le panorama à 360°.
Les enfants du Mékong
Au fil de la navigation, il n’est pas rare que notre barque face un court arrêt sur les rives pour réapprovisionner les habitants isolés. Des petites filles en profitent pour bondir sur le bateau en jouant des coudes pour être sûre d’être la première à vendre ses bracelets faits maison. La détermination et l’aplomb de ces petites filles me prend de court. Face à 6 mains tendues présentant leur travail artisanal, le regard pénétrant de cette petite fille me glace le dos. La pression est palpable, les bras sont tendus et raidis, pas une seule ne sourit, leurs pensées hurlent « Prends le mien !!!! ». Sous la pression, je ne connais même plus mes couleurs préférées, il me semble que je choisis le bracelet de la petite fille qui dégage la détermination la plus forte. Elle m’arrache littéralement les billets des mains.
Dans ce monde d’extrême pauvreté, je me rends compte, là maintenant, tout de suite, que l’enfance et l’innocence n’existent pas. Il n’y a pas de place pour ça. Chacun sa peau et c’est l’argent qui nous sauvera. Cet épisode n’est que le premier d’une longue série durant notre voyage au Laos.
Escale à Pakbeng
Notre barque ne navigue pas de nuit, donc nous avons une escale obligatoire dans cette ville transit qui a tout de même, selon nous, beaucoup plus de charme que Houei Sai.
Ce petit village accueillant à flanc de colline verdoyante a les pieds dans le Mékong. En plus d’offrir une vie locale animée et paisible, il y a, dans ce lieu, l’opportunité de visiter l’un des rares sites où les éléphants évoluent dans leur environnement naturel en pleine forêt. Sur le bateau, un proche du couple de Français qui s’occupe de ce site expliquera que l’idée du projet est de sensibiliser les locaux au milieu de vie naturel et au soin du pachyderme. Dans ce sens, d’ici quelque temps, les habitants pourront reprendre la gestion des lieux et transmettre le message.
https://www.mekongelephantpark.com/accueil.html
Hélas, nous n’étions pas au courant de l’existence de ce site et il est maintenant trop tard pour modifier les billets. On ne profitera que de la douche des éléphants dans le Mékong à 7h le matin avant de partir pour notre seconde journée de navigation vers Luang Prabang.
L’Indochine est omniprésente
Je ne vous raconte pas notre tête lorsque le vieux propriétaire de notre auberge nous accueille en français !
La fin du protectorat français date seulement de 1953, année de déclaration de l’indépendance du Laos.
Les restaurants affichent des menus en français !
Les boulangeries bordent la seule route principale.
Nous passons une très belle soirée avec nos compagnons de route autour d’un verre dans l’un de ces fameux Happy Bar … Autre concept laotien qui sous entend que dans un « happy lieu », on peut agrémenter mets et boissons de marijuana. Apparemment, ici « sans Marie Jeanne la fête est moins happy ! »
Débarquement dans le joyau du Laos
Après ce voyage splendide au fil du Mékong, nous mettons pied à terre dans la capitale culturelle du Laos. Classée au patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco, Luang Prabang est réputée pour sa beauté et son style unique mêlant l’architecture coloniale et traditionnelle Lao. On a hâte de vous faire découvrir ça …
4 réponses
💖
Une belle lecture, encore, au petit déjeune.
Rafraîchissant.
J espère que votre voyage se passe au mieux.
Bises la famille
Très belles photos, article très intéressant, on voyage avec vous, bises, continuez!!
On se laisse aller au fil des mots . Pour le cou on était au fil de l’eau comme suspendu a votre coup! Petit clin d’oeil bien entendu . Super je vous embrasse. Eric.